Sous un soleil ardent, le stade de football de SOGEFIHA, dans la commune populaire d’Abobo, a vibré ce samedi 15 mars 2025 à l’occasion de la 48ème édition de la Journée internationale des droits des femmes. Organisée par l’Organisation des femmes du Front populaire ivoirien (OFFPI), sous l’impulsion de sa présidente Paule Ginette Sopou épouse Séka, cette manifestation a rassemblé des milliers de personnes, majoritairement des femmes drapées dans les pagnes aux couleurs du FPI. Un événement politique et festif, marqué par des discours engagés, des danses et un plaidoyer sans équivoque pour l’autonomisation des femmes.
Une mobilisation massive malgré les défis
Dès 8 heures, l’ambiance était électrique. Malgré le carême chrétien et le jeûne musulman, la foule a afflué, dépassant largement les 16 bâches dressées pour abriter les participants. Jeunes filles, mères de famille, et même des chefs traditionnels – gardiens des usages locaux – ont répondu présent. Une sonorisation puissante a accompagné les premiers pas de danse spontanés, symbole d’une joie collective qui a transcendé les clivages religieux et sociaux.
A midi, l’arrivée de Pascal Affi N’Guessan, président du FPI, et de son épouse Angéline Kili, tous deux vêtus aux couleurs du parti, a déclenché une ovation. Les youyous des femmes ont résonné tandis que le leader politique effectuait un tour d’honneur, parfois interrompu par des groupes de femmes enthousiastes. « Votre mobilisation montre que la question de vos droits vous préoccupe », a-t-il lancé en préambule, saluant la présence des chefs de village et de communauté, « garants des traditions et des mânes des ancêtres ».
Discours et plaidoyers : Les femmes en première ligne
La cérémonie, ouverte par L’Abidjanaise, a donné la parole à plusieurs figures clés. Kouakou Adjoa du Conseil politique régional d’Abobo a rappelé l’importance de l’événement pour la commune. Mme Odette Thiémélé, représentante du Mouvement des générations capables de l’ex-Première dame Simone Ehivet Gbagbo, a martelé : « Les droits ne doivent pas être octroyés aux femmes, elles doivent les conquérir ». Un message repris par Paule Ginette Séka, qui a vanté les avancées du FPI : « Nous n’avons pas attendu pour appliquer le quota de 30% de femmes dans les instances. Bientôt, nous viserons 50% ».
Cinq vice-présidentes historiques de l’OFFPI – Christine Konan, Christine Adjobi, Laure Anidié, Yvonne Abané Bouabré et Simone N’Guessan – ont été célébrées pour leur engagement pionnier. Un moment émouvant, symbole de la lutte intergénérationnelle pour l’égalité.
Affi N’Guessan dénonce une « politique tordue »
Vers 14 heures, le discours tant attendu de Pascal Affi N’Guessan a captivé l’assistance. Premier discours officiel de cette année électorale 2025, il a mêlé critique acerbe du pouvoir en place et promesses de changement. Le président du FPI a fustigé le bilan « nul » du gouvernement sur les droits des femmes, pointant un budget dérisoire de 27 milliards de FCFA alloué au ministère chargé de la Femme, sur un budget national de 15 000 milliards. « Comment apporter l’égalité avec si peu ? », a-t-il interrogé, dénonçant une politique « centrée sur les infrastructures, pas sur les humains ».
Avec virulence, il a évoqué les classements internationaux accablants : taux de mortalité infantile élevé, conditions d’accouchement précaires, éducation en berne. « La Côte d’Ivoire marche sur la tête. Nous voulons la remettre sur ses pieds, en plaçant l’humain au cœur de notre projet », a-t-il déclaré, promettant de « redresser la politique tordue » en cas de victoire à la présidentielle.
Une fête politique, miroir des enjeux ivoiriens
Au-delà des discours, la journée a incarné la stratégie du FPI de s’appuyer sur les femmes et les traditions pour consolider sa base. Les danses, les chants et les pagnes aux couleurs du parti ont transformé le stade en un espace de revendication et de ferveur militante. Les chefs traditionnels, invités d’honneur, ont symbolisé l’ancrage local d’un parti qui se présente comme défenseur des valeurs africaines et de la modernité.
Alors que le pays s’apprête à vivre une élection présidentielle cruciale, cet événement a rappelé que la question des droits des femmes reste un marqueur politique fort. Entre espoirs et défis, les femmes d’Abobo, comme celles du reste du pays, attendent désormais des actes concrets. Comme l’a résumé une participante : « Aujourd’hui, on danse. Demain, on vote ».
Robert Krassault
ciurbaine@yahoo.fr